
Peu avant le seuil fatidique des 72 heures, l’angoisse des familles montait à Mexico vendredi pendant que les secouristes jetaient leurs dernières forces dans la bataille pour retrouver des survivants après le séisme qui a fait près de 300 morts.
A l’issue d’un tremblement de terre, la procédure veut qu’à partir de trois jours les recherches de personnes cessent et les bulldozers commencent à dégager les gravats. Les experts estiment en effet qu’il y a alors peu de chances de retrouver des survivants. Mais les proches des disparus, qui se comptaient par dizaines dans cette mégalopole de 20 millions d’habitants, réclamaient une prolongation des recherches au-delà de vendredi 18H14 GMT.
Au coeur de la capitale mexicaine, sur les ruines d’une usine textile, un des 39 bâtiments ayant cédé à Mexico, les sauveteurs étaient confrontés à un véritable dilemme : continuer (mais jusqu’à quand ?) ou arrêter ?
« Ils n’ont pas d’indices sur la présence d’une personne à l’intérieur mais ils ne sont pas sûrs au point d’affirmer qu’il n’y a personne. La caméra utilisée ne permet pas de voir tout le panorama », explique à l’AFP, Daniel Quiroz, un bénévole de 22 ans.
Hector Anguiano, un homme de 18 ans équipé d’une masse, explique que l’idée de faire intervenir les bulldozers est catégoriquement rejetée par les habitants du quartier et les passants.
Aux cris de « un, deux, trois ! », bénévoles et soldats retirent à l’aide de cordes des restes du bâtiment et même une voiture.
Selon le dernier bilan du responsable national de la protection civile, Luis Felipe Puente, on enregistrait au total 286 morts : 148 à Mexico, 73 dans l’Etat de Morelos, 45 à Puebla, 13 dans l’Etat de Mexico, six dans le Guerrero, un à Oaxaca. Quatre Taïwanais, une Panaméenne et un Espagnol en font partie, d’après les autorités de leurs pays respectifs.
La marine mexicaine a souligné que, jusqu’à jeudi, 115 personnes avaient été extraites vivantes des décombres et 88 retrouvées mortes.
– Experts internationaux –
Des experts américains et israéliens, notamment, participaient aux recherches dans les quartiers branchés de Roma et de Condesa pour détecter les moindres signes de vie.
Devant ce qui fut un immeuble de bureaux de sept étages, de nombreux proches n’ayant pas dormi depuis mardi espéraient retrouver en vie une dizaine de disparus sous les gravats. Certains semblaient au bord du désespoir.
« Ils se contentent de venir nous dire toujours la même chose ! Depuis hier, ils ne sortent plus personne…Ils arrêtent à cause de la pluie, du soleil, ce ne sont que des mensonges ! », s’insurge Xochitl Gonzalez, une femme au foyer de 39 ans qui recherche son cousin.
A l’école Enrique Rebsamen, les autorités ont éteint une lueur d’espoir qui avait tenu en haleine le Mexique et les médias du monde entier : il n’y avait en fait aucune jeune fille vivante sous les décombres.
« Nous avons la certitude que tous les enfants sont soit malheureusement morts, soit dans des hôpitaux ou chez eux », a déclaré aux médias le ministre de la Marine Angel Sarmiento. Dans l’écroulement de cette institution scolaire privée, une vingtaine d’élèves âgés de sept à 13 ans ainsi qu’une demi-douzaine d’adultes sont morts.
Des proches et des voisins ont déposé des gerbes de fleurs blanches en hommage aux enfants tués. D’autres se serraient dans les bras, en larmes, tandis que l’un d’eux chantait accompagné de sa guitare, a constaté l’AFP.
« C’est triste, ça fait mal, là, maintenant. Je ne trouve pas les mots pour exprimer ce que l’on ressent quand on a perdu un être cher », a témoigné Miguel Angel Ortiz, l’oncle de l’une des personnes tuées. « On a fait croire aux gens qu’il y avait une petite fille ».
– Solidarité –
Le séisme a endommagé plus de 2.000 (bien plus de 2.000) logements, dont la plupart ont été désertés par leurs occupants traumatisés par la secousse, selon la mairie.
Erika Abarran a passé une partie de la nuit dans un local de distributeurs automatiques d’une banque. Quand elle a appris que les autorités avaient installé une cinquantaine de refuges, elle et son mari se sont rendus dans une de ces structures improvisées où ils ont pu recevoir des repas grâce à la grande solidarité des Mexicains.
« Je n’ai même pas pris de couches, de lait, mais ils nous ont tout donné », dit cette femme de 33 ans qui nourrissait son bébé au moment du séisme.
Le séisme de mardi est survenu 32 ans jour pour jour après celui de 1985 qui a dévasté Mexico, faisant plus de 10.000 morts – jusqu’à 30.000 selon certaines estimations -, et qui reste un traumatisme national.
Cette nouvelle tragédie frappe un pays encore sous le coup d’un tremblement de terre de magnitude 8,2 -le plus puissant en un siècle au Mexique-, qui a fait une centaine de morts et plus de 200 blessés dans le sud le 7 septembre.
Il a surpris nombre de Mexicains : l’alerte sonore censée prévenir en cas de tremblement de terre n’a pas fonctionné ou s’est déclenchée trop tard.
Situé à la jonction de cinq plaques tectoniques, le Mexique est l’un des pays du monde où l’activité sismique est la plus forte.
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