
Le sort de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien est au coeur des préoccupations de la semaine diplomatique à l’ONU, où les Européens tentent de convaincre Donald Trump de ne pas jeter aux orties un texte considéré comme crucial pour la non prolifération.
Le président américain est l’objet de toutes les attentions dès lundi: il doit rencontrer le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui lui demandera d’annuler l’accord, puis le président français Emmanuel Macron, qui voudra le convaincre de le garder.
L’accord de Vienne, conclu le 14 juillet 2015 entre Téhéran et les grandes puissances (Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Chine, Russie et Allemagne) est plus que jamais remis en cause par le président américain, qui le qualifie d' »horrible » et a promis de le « déchirer ».
Lundi, lors d’un entretien, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres et le président iranien Hassan Rohani « ont souligné l’importance d’une application pleine et réelle (de l’accord) par tous ses participants », selon un communiqué des Nations unies.
Etats-Unis et Iran s’accusent mutuellement de violations de l’accord.
Arraché après plus d’une décennie de négociations sous tensions et entré en vigueur en janvier 2016, cet accord garantit la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien, en échange d’une levée progressive des sanctions internationales.
Or une échéance cruciale s’approche: Donald Trump doit « certifier » mi-octobre auprès du Congrès que Téhéran se conforme bien à ses engagements, et certaines de ses déclarations laissent penser qu’il pourrait décider de ne pas le faire.
Cette non certification, qui irait à l’encontre des conclusions de l’AIEA (Agence internationale de l’Energie atomique) selon qui Téhéran respecte ses engagements, ouvrirait la voie à une réimposition des sanctions américaines. Et inquiète au plus au point les autres signataires de l’accord.
– Accord en grand danger –
« Si Trump ne certifie pas, l’accord sera en très grand danger. On peut toujours arguer juridiquement qu’il n’est pas mort, mais politiquement, c’est un signe », estime un haut diplomate européen, pour qui il ne fait pas de doute que « les Iraniens prendront des mesures significatives » si Trump ne certifie pas.
« Il nous paraît essentiel de maintenir l’accord, et nous allons tenter de convaincre Trump de la pertinence de ce choix », a d’emblée plaidé le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian lors d’un point de presse lundi matin à New York.
Une remise en cause de l’accord ouvrirait la voie à « une spirale de prolifération », a mis en garde le ministre, insistant sur le contexte déjà explosif avec la crise nord-coréenne.
La France, qui avait été l’un des pays les plus durs dans la négociation avec Téhéran, n’a cependant pas fermé la porte à une éventuelle discussion sur « l’après 2025 ». L’accord de Vienne est en effet d’une durée de dix ans concernant certaines dispositions et au-delà de la « sunset clause », Téhéran pourra relancer une partie de ses activités.
« On peut compléter par un travail pour l’après 2025 », a déclaré M. Le Drian sans plus de détails, même si la plupart des signataires de l’accord, au premier rang desquels Téhéran, ont exclu toute renégociation du texte.
– Destabilisation régionale –
Israël, l’un des plus farouches détracteurs de l’accord de 2015, réclame au minimum une renégociation drastique du texte.
Téhéran de son côté accuse les Etats-Unis de saper l’accord et le guide suprême iranien Ali Khamenei, qui a la haute main sur le dossier nucléaire, a martelé dimanche que l’Iran ne céderait pas aux « intimidations » de Washington.
Les Etats-Unis accusent la République islamique chiite de violer l’esprit de l’accord et d’accroître son influence déstabilisatrice dans la région, en Syrie, au Liban ou au Yemen.
« Les dirigeants iraniens veulent utiliser l’accord nucléaire pour prendre le monde en otage », a ainsi martelé début septembre l’ambassadrice américaine à l’ONU Nikki Haley.
« Nous avons une discussion compliquée avec l’administration américaine, pour leur expliquer la conception de l’accord, leur répéter qu’il ne vise que le nucléaire et qu’on n’a jamais eu la prétention de régler tous les autres sujets », explique le haut diplomate européen. « On partage la plupart des préoccupations américaines sur le rôle destabilisateur de l’Iran dans la région, mais pour autant vouloir tout mélanger c’est prendre le risque de tout perdre. A l’heure actuelle, la menace existentielle pour le monde, c’est la bombe. L’accord nucléaire n’est pas là pour résoudre les problèmes du Liban ».
Outre l’Iran et la Corée du Nord, les échanges cette semaine devraient aussi porter sur la Birmanie et la manière de gérer au mieux les opérations de paix de l’ONU dans le monde.
Lundi matin, en prélude à cette semaine diplomatique annuelle traditionnellement riche, Donald Trump a fait endosser à près de 130 pays une déclaration politique visant à pousser l’ONU à se réformer. Selon lui, l’Organisation est entravée depuis plusieurs années par sa « bureaucratie ».
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